10/10/2023

Script pour une vidéo sur les marchands de toile

Le touriste qui découvre nos villages du Cézallier et de l’Artense est interpellé par l’architecture imposante ou originale de certaines maisons qui  tranchent sur l’aspect traditionnel du bâti local. 

Cette question, Gérard Fandard, le créateur de l’Association "La mémoire des marchands de toile", se l’est posée en s’installant à Égliseneuve d’Entraigues. 
Ce sont les maisons de marchands de toile, une catégorie particulière de commerçants itinérants : elles témoignent de la réussite de ces migrants qui, dès la seconde moitié du 19ème siècle, fuyant la pauvreté et la rigueur du climat, sont partis sillonnés la France, certains l’Algérie, pour vendre de la toile, plus tard tout le linge de maison,  en voiture à cheval, la maringote, puis dès les années 1930, en automobile.

Cette réussite a attiré beaucoup de jeunes du pays et ont pu susciter des critiques… Ce sont créées de véritables lignées de marchands de toile.
Leur force : savoir « faire l’article » aux clients qu’ils prospectaient ; les fidéliser en s’attirant leur confiance car les marchands peu scrupuleux, les « leveurs », ont été éliminés au fil des réglementations et de la professionnalisation du métier. Autre atout : la vente à « tempérament » pratiquée avant la généralisation du crédit à la consommation.

Les marchands de toile, héritiers du monde de la campagne, étaient individualistes de nature et solidaires par nécessité. Ils ont su pourtant s’organiser pour défendre leur profession  en créant des syndicats locaux dès les années 1920 puis une fédération nationale, se regrouper en centrale d’achat pour bénéficier de tarifs préférentiels et garantis (Centrachat).
L’âge d’or des marchands de toile, assimilés à tort à l’origine à de vulgaires marchands ambulants  ou forains, se situe dans les années 1920-1939 (plus de 3500 sont enregistrés), puis dans les années 1950-1970 (plus de 1000 adhérents à la Fédération nationale dotée d’un périodique Reflets d’Auvergne devenue Négoce Avenir).

Au centre d’un véritable éco-systéme  qui relie la filière textile française aux consommateurs en associant intermédiaires, représentants, et l’économie locale de la « Terre sainte où ils conservent leurs attaches et retournent fréquemment. Ces commerçants, devenus des négociants voyageurs, rencontrent chaque année  fin juillet à la Foire de Bort-les-Orgues les fabricants.  Un courant d’affaires  entre fournisseurs et marchands de toile  parcourait le  pays tout l’été.

Les négociants voyageurs tutoyaient la politique : d’abord avec Georges Pompidou, dont le grand-père Étienne Chavagnac était un des leurs ; plus tard Roger Besse, le dynamique président de la Fédération nationale, deviendra sénateur et président du conseil général du Cantal. Jacques Chirac, Valéry Giscard d’Estaing, qui connaissaient bien les problématiques de la profession, ont été réceptifs à ses démarches.
Pour faire connaître et reconnaître les marchands de toile, une association a vu le jour en 2015 à l’initiative de Gérard Fandard, à la fois centre de ressources et organisatrice d’évènements et d’expositions à Égliseneuve d’Entraigues.

Jean François Serre 
Président de La mémoire des marchands de toile